jeudi 23 juin 2011

Contre-courant

Dans un fracas de rochers
dans un fracas de galets
     le torrent...
Du bout de l'orteil je le tâte, je l'ausculte,
je m'enhardis : un pied, deux pieds,
     un pas, deux pas, de l'eau jusqu'aux mollets,
eau bouillonnante et glacée mais voilà, c'est lancé
     il faut marcher
à contre-courant, bien sûr, ne tombons pas dans la facilité !
Mes pieds nus glissent sur les galets je m'accroche aux bords.
Le torrent me fouette et me freine, peu importe :
     je prends mon rythme de croisière
car c'est pour une longue marche que je suis partie.
De temps à autre un rocher à escalader
     puis je retombe dans cette effervescence.
Progresser en s'immobilisant parfois pour écouter le bruissement du courant,
     l'appel d'un oiseau, le souffle de l'air
et surtout, surtout contempler ici, là, une végétation brouillonne,
     la magie des falaises,
courtes récompenses dans l'effort de la marche.
J'avance en sentant qu'il est important de le faire
     mais sans savoir pourquoi.
Le lit du torrent se rétrécit peu à peu et l'eau devient plus cristalline.
Je marche, je marche en titubant
     le temps s'étire et mes pieds sont glacés.
Le torrent n'est plus qu'un filet étroit
et voilà que peu à peu : sentiment de légèreté, de joie,
     comme une ivresse.
Que se passe-t-il donc ?
     Fatiguée, frissonnante, oui, je le suis
et pourtant... une envie de danser.
Tout devient plus transparent : l'eau, bien sûr, mais aussi les rochers,
la montagne, le ciel et moi
comme aux premiers jours du monde
     comme aux premiers jours de moi-même...
Oui, ivresse des premiers jours — la SOURCE !
Je me penche et je bois,
     je bois...

Geneviève